Un Cri d’Existence


UN CRI D’EXISTENCE

Un Grito de Existencia

 

Un périple à vélo de jeunes de quartiers mexicains pour défendre leurs droits et lutter contre la discrimination, la répression et la violence en créant un mouvement national

La banda, comme on dit au Mexique, c’est une bande d’amis, un groupe de jeunes, que l’on retrouve principalement dans les quartiers populaires. La traduction n’est pas évidente, ce serait la bande en Français, le gang ou le crew en Anglais. Quand on est né dans le quartier, la banda représente la famille, les amis, ceux avec qui on a vécu les meilleurs moments, mais aussi les pires. Dans les quartiers mexicains, quand on fait partie de la banda, de la place, del barrio, c’est un soutien au quotidien, dans un contexte global souvent difficile. Mais, hors de ces quartiers, nombreux sont les préjugés envers cette jeunesse.

Les jeunes qui font partie de ces bandas des quartiers populaires représentent une part importante de la population mexicaine et souffrent d’une grande discrimination du reste de la société. Ils ont des caractéristiques identitaires spécifiques et fortes, comme la musique (principalement la cumbia), les tenues vestimentaires, les tatouages, les références religieuses ou le hip hop. Ils sont délaissés par les services de l’État et sont des proies faciles pour le crime organisé. San Luis Potosi, une ville de plus d’’un million d’habitants à 400 km au nord de Mexico, comptabilise plus de 800 bandas, dont les membres sont âgés de 15 à 35 ans.

Un Cri d’Existence est une initiative citoyenne, née du constat qu’il est indispensable de valoriser la culture des jeunes de bandas au niveau national, mais aussi international. Elle s’inscrit dans un contexte délicat de grande violence sur tout le territoire mexicain, lié au narcotrafic et au crime organisé. Cesar Carrizales, 35 ans, est un gars de banda repenti. Il est passé par plusieurs moments difficiles, mais déclencheurs lorsqu’il vivait la vida loca (« la vie folle ») dans les quartiers de San Luis Potosi. Plutôt que de sombrer, il a décidé de s’engager en soutien à ses pairs, pour que ces jeunes puissent aller de l’avant. Il a fondé l’association Movimiento Juvenil Popular pour mettre en place différents projets à destination des jeunes de quartiers, comme des tournois de foot, organisation de soirées, graffitis, plans jobs, hommages aux jeunes disparus… Cette année, il voit plus grand. Il rêve d’un mouvement national, un rassemblement des bandas du pays pour défendre leurs droits, leur intégration et lutter pour leur considération dans la société. Ce mouvement revendique l’adoption de lois protégeant la jeunesse marginalisée, le soutien de la jeunesse par les institutions, la mise en place de lieux d’accueil, l’accès à l’éducation, la culture, l’emploi, mais aussi la reconnaissance de la culture de quartier en tant que telle.

Le 6 février 2015, il a pris la route en vélo en direction du nord du pays avec cinq jeunes de différents quartiers de San Luis et de son agglomération. Accompagnés du photographe Jean-Félix Fayolle, les participants âgés de 17 à 35 ans ont parcouru1500 km à vélo pendant près d’un mois et demi. Ils sont passés par Matehuala, Saltillo, Monterrey, Aguascalientes, Léon et Querétaro pour finalement arriver à Mexico. Dans chaque ville, ils ont formé un comité de représentation local du mouvement et adressé à chaque municipalité leurs revendications. A Mexico, c’est à la Chambre des Députés, au Sénat et à la Présidence de la République qu’ils ont remis ces pétitions.

La banda ciclista (« l’équipe cycliste ») a pu rencontrer et échanger avec de nombreuses bandas de différents quartiers du pays, mais aussi subir la répression de la police avec des contrôles dits « de routine » injustifiés. Ils ont également participé à la réalisation de photos et vidéos en vue d’un documentaire avec le soutien de Jean-Félix. Le projet n’était pas financé par une collectivité ou une entreprise, mais par les amis des quartiers de San Luis et les personnes rencontrées sur le chemin. Le groupe, avec peu de moyens, a dû affronter les éléments climatiques, la faim, la fatigue, de nombreux dangers, mais sont arrivés sains et saufs le 13 mars 2015 à San Luis Potosi où ils ont été accueillis avec fierté.

Il s’agit d’une première pierre, d’un début plutôt encourageant en voyant la motivation des bandas rencontrées, mais aussi des politiques et de personnes hors des quartiers. Les esprits commencent à réaliser qu’un changement positif est possible. Ce périple inédit a été relayé par de nombreux médias, parfois nationaux. Il est encore difficile de prendre du recul sur l’impact qu’aura cette caravane de chavos banda (« mecs de bandes ») à San Luis Potosi, dans les villes traversées et au niveau national. Arrive le temps des campagnes électorales, Cesar Carrizales et son mouvement sont en contact avec des députés afin de préparer une loi au niveau estatal reconnaissant les cultures urbaines. L’association tient à rester apolitique et à continuer les actions dans les quartiers de la ville, tout en consolidant les contacts créés au niveau national. Un second projet à vélo devrait prochainement voir le jour pour se rendre dans les 23 Etats qui n’ont pu être visités lors de cette première édition.

Clip video youtube : https://www.youtube.com/watch?v=Vu-0Lq9GYoY

Blog du périple à vélo : www.un-grito-de-existencia.com

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